Jessie (Gerard’s game) de Mike Flanagan, un film horrifique qui va plus loin que ce que l’on attend de lui.

Katchouk!

Y’a t-il des amateurs.trices de films d’horreur dans la salle ?

Vous aimez les films sanglants à la Saw et compagnie ? Les films où ça court dans tous les sens, où ça crie, où le tueur est clairement défini ? Ça tombe bien, Gerard’s Game (ou Jessie, en français, ce qui a plus de sens à mon avis) ne fait pas parti de ces films là.

Aujourd’hui, je vais vous parler huis-clos, horreur psychologique. Des fantômes ? Que nenni ! Que ceux qui préfèrent les ambiances bien installées, les révélations de dernières minutes, les introspections profondes restent parmi nous, le film dont je vais vous parler risque de vous plaire. (J’autorise les autres à rester aussi, je ne suis pas un monstre)

Dans Jessie, on suit la petite virée en amoureux de l’héroïne du même nom avec son mari, dans leur chalet familial. Le coin, tranquille, est éloigné des autres habitations. Personne ne risque de déranger ce couple qui, ont le devine très vite, est au bord de la rupture. Pour Gérald, c’est sûr, ce week-end où ils vont se retrouver tous les deux va leur faire le plus grand bien. Sur la route, Jessie et Gérald vont croiser un pauvre chien errant, qui semble affamé. Retenez bien l’info.

Vous vous en doutez bien, l’association couple au bord de la rupture + chalet isolé n’est pas de bon augure. Mais si je vous dis qu’en plus, Jessie est une adaptation d’un roman de Stephen King ?

Oh.

Je crois que vous avez compris.

Alors que Gérald, sous viagra, tente d’initier Jessie à son jeu sexuel (un jeu de domination un poil malsain où la jeune femme se retrouve menottée au lit conjugal, ce qui est loin de lui plaire), celui-ci est victime d’une crise cardiaque et tombe sur sa compagne, mort.

Personne aux alentours, son tendre de mari a tout fait pour qu’ils soient effectivement seuls pour un week-end, voire plus. D’autant que le chien croisé plus tôt a flairé l’odeur du corps…

Mais si vous pensez que le film se résume à une bête histoire de survie, vous allez être surpris. Mike Flanagan a parfaitement saisi l’ambiance qui règne dans les romans du King de l’horreur et nous la transmet de manière magistrale. On comprend bien vite la relation qu’entretenait Jessie avec son mari était loin d’être idéale mais surtout on découvre la relation qu’elle noue avec elle-même et le secret qu’elle porte depuis l’enfance. Le scénario est très bien ficelé, entre flash-back, moments de lucidité et crises de panique donnant à l’héroïne des hallucinations très réussies.

La performance de l’actrice (Carla Gugino) est parfaite : on la voit tour à tour séductrice maladroite, coach de survie, courageuse et volontaire ou démissionnaire, assoiffée… et l’on se demande même parfois si en face de nous se trouve la même femme, la même actrice. Celle de Bruce Greenwood, en mari un brin malsain, lui répond tout aussi bien.

Profondément féministe, le film joue sur la symbolique de l’enfermement plutôt que sur la terreur : l’héroïne n’est pas seulement coincée dans sa situation mais dans sa vie, son passé et ses peurs. La robe et le lit (symboles du désir masculin), les menottes (à la fois prison du silence et du mariage), l’éclipse (vol de l’innocence, culpabilité, peur…) sont autant de motifs qui se répéteront, se répondront dans son passé et son présent.

La photographie donne des séquences magnifiques (je pense notamment à la scène d’ouverture du lit filmé par en haut, qui se répétera un peu plus tard) montrant ce qu’il a à montrer, laissant le reste à l’imagination du spectateur. Le cadrage est ingénieux, notamment dans la première partie, et très dynamique.

Mais le plus de ce film, pour moi, c’est sa fin. Je ne vous dirai rien pour ne pas vous spoiler mais toute la profondeur du film tient dans ces 10 dernières minutes.

D’un film d’ambiance assez classique, cette fin livre finalement un film avec une héroïne forte, une symbolique énorme et un empowerment total.

Une fin qui nous dit que nous sommes les seul.e.s à pouvoir nous libérer de nos menottes et faire face à nos peurs, dans un monde où le désir masculin prime.

« Tu es tellement plus petit que dans mes souvenirs. »

Film disponible sur Netflix 🙂

Mais vous connaissez peut-être ?

Nolwenn

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